Noélia Dawn • « J'additionne les addictions. » [VALIDE]

Cher journal,
Elle m'a conseillé d'écrire, ma psy. J'aurais pourtant cru que mon mutisme qui durait depuis presque trois mois trois fois par semaine aurait fini par la décourager. À croire qu'elle était plus forte que moi, cette grande perche péroxydée. Pas vraiment le type même de la psy...comme quoi, il ne faut jamais se fier aux apparences. Enfin, j'ai fini par céder du coup j'écris. Elle m'a même dit qu'elle ne lirait rien de ce qui noircira ces pages. Du coup...je ne vois pas vraiment pourquoi je fais ça. Passons, elle m'a dit de tout raconter...
Tout ce qui suivra sera uniquement des suppositions, c'est ma mère qui m'a renseigné sur cela, je ne suis donc absolument pas sûr de ce qu'elle m'a raconté. Ce n'est pas comme si elle était d'une fiabilité à toutes épreuves. Août 1990, ma mère, Torey Dawn venait seulement de fêter ses dix-huit ans, il y a deux mois. Sa mère -ma grand-mère donc- avait organisé une énorme fête pour l'occasion et tout le monde avait bu plus que de raison. Cette nuit là, il n'y a pas que ses dix-sept ans qui avaient été enterrés, sa virginité aussi. Personnellement je trouve cela kitsch, comme se faire dépuceler le jour du bal de promo. Vous voyez le genre ? Mais bon, à ce que ma dire ma mère, c'est ce à quoi elle aspirait...chacun fait comme il veut. Tout c'était bien passé...si ce n'est que dans 'le feu de l'action' Torey et John tellement futés étaient-ils n'avaient pas pensé à 'se protéger', comme on dit. C'est pourquoi, deux mois après cette fête et après maintes et maintes nausées et autres symptômes, Torey c'était -enfin- décidé à faire un test de grossesse. Test qui se révéla positif. Bien que ma mère ai qualifié cela de 'cadeau du ciel', John était nettement moins emballé et c'est comme cela que Torey se fit larguer. La vie s'acharna sur elle ; elle n'attendait pas un, mais deux enfants. Mais pourtant elle continuée malgré tout à trouver cela 'super'. Je n'ai jamais compris pourquoi. Franchement, me retrouver enceinte à mon âge de deux gamins et seule je crois que je n'aurais pas supporté. Ma mère ne parle pratiquement jamais de sa grossesse, je sais juste qu'elle s'est trouvée un travail comme photographe puis qu'elle a quitté le domicile familial.
Quinze mars 1991, le jour de ma naissance et de celle de mon frère. De ça non plus elle n'en parle presque pas, je sais juste que mon frère est né le premier ; Noah Dawn un beau bébé pile dans la norme. Et puis moi, Noélia Dawn, 2 kilos tout pile, trop maigre, trop fragile. Je suis restée plusieurs mois en couveuse et après cela, nous sommes partis tous les trois pour Londres afin que la carrière de ma chère mère puisse décoller. Jusqu'à mes cinq ans je n'ai plus aucun souvenir, je sais seulement que, apparemment j'étais heureuse -à en croire les photos et les dires de ma mère- et que mon premier mot fut 'Papa'. Lorsque Torey me l'a dit, je n'ai pas vraiment saisi en quoi cela était important. Et puis j'ai compris. J'ai compris que depuis que j'étais en âge de comprendre je lui en ai toujours voulu de nous avoir élevé, mon frère et moi, sans la figure paternelle qui nous manqués. Elle n'avait pourtant rien fait de mal elle. C'est cela que je n'arrive pas tellement à expliquer ma haine envers elle. Haine que ne partage absolument pas Noah, lui il la trouve 'tellement courageuse'. Naïf. Notre relation a toujours été fusionnelle, ayant eu un petit appartement, nous avons partagé la même chambre jusqu'à nos dix ans ce qui a renforcé nos liens. Alors qu'avec ma mère, pendant mon adolescence le fossé s'est creusé. Je la détestais, n'éprouvai pour elle que du dégoût. Je crois que, même si nos relations ce sont à peine améliorées, je m'en veux d'avoir été si méchante et injuste avec elle. L'adolescence on va dire.
Mon adolescence justement, sa banalité était risible. J'étais tellement comme tout le monde, enfin, pendant une partie de mon adolescence, jusqu'à quinze ans. Jusqu'au jour où j'entrai au lycée. Je crois que c'est à ce moment-là que j'ai trouvé la vraie moi. D'un naturel social, extraverti et attachant je n'eus aucun mal à me faire des amis. De vrais amis. Mes notes n'étaient certes pas terrible, mais je me débrouillais et bien qu'ayant changé de lycée plusieurs fois au cours de ma scolarité, à cause de mon incapacité à choisir une seule voix et voulant tout faire. Je me dirigeai finalement vers l'art. Ma famille me trouvant 'hyper créative'. Peut-être. J'ai suivi leur conseil. De toutes façons, peut importe, je suis jeune, j'ai le temps. Pendant cette période de l'adolescence, mon corps changea aussi. Fini l'appareil dentaire hideux et les boutons. Je grandis aussi, mais ne grossis cependant que très peu. J'attirai à l'époque beaucoup de garçons, grâce certainement à mon air fragile et pourtant sexy. J'avais -et j'ai toujours- de longs cheveux brun m'arrivant au milieu du dos, des yeux en amandes marrons. Je suis belle. À ce que l'on dit. Au lycée j'étais une fille normale rien de plus, rien de moins. Quelques jours avant le bac français, devant le lycée un dealer vendait sa came qui selon lui 'me rendrait pleine d'énergie'. Pourquoi pas ? Me dis-je et c'est comme ça que j'avais commencé à prendre de la drogue. C'est comme l'amour, une fois qu'on y a goûté, on ne peut plus s'en passer. C'est d'ailleurs à cause de la drogue que ma mère m'a forcé à venir chez un psy, heureusement pour moi, grâce à ma ruse, j'ai réussi à lui caché cela pendant un an, jusqu'à ce que je me fasse prendre malencontreusement et qu'elle m'envoie voir une psy. La plupart des gens mettent ma dépendance à la drogue sur le fait que je n'ai pas eu de père. Peut-être. Je n'ai pas vraiment d'avis sur la question finalement, peu importe.
La seule chose qui m'importe finalement c'est lui. Walen. Même son prénom me paraît magnifique. Je l'aime inconditionnellement et d'un amour sans fin. C'est tellement nunuche de dire cela, ça ne me ressemble pas, mais c'est pourtant tellement vrai. Un coup-de-foudre, exactement le genre de choses auxquelles je ne croyais pas avant...avant lui. Je l'aime c'est certain, mais je ne sais pas si je suis prête pour tout ça. Et puis, je m'en veux de l'avoir entraîné dans ma chute. J'espère seulement que malgré tout il restera.
Je crois que je n'ai plus rien à dire. Le plus important est là. Maintenant je ne sais pas où va finir ce petit carnet rose bonbon, une couleur qui, en passant, me sort par les yeux. Peut-être que cette psy aux airs de Californienne va le brûler ou je ne sais quoi. J'espère seulement qu'elle ne va pas le lire. C'est vrai quoi, ce n'estt pas prace que c'est une psy qu'elle peut tout se permettre, non mais oh!